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Loi 96 – Ce que les entreprises faisant affaires au Québec doivent savoir

18 juillet 2022 - Canada 3 min lecture

Si vous détenez une entreprise faisant affaire au Québec, que vous employez plus de 25 personnes au sein de son entreprise ou encore que vous financiez une entreprise au moyen de sûretés mobilières, les nouvelles exigences en matière de langue française risquent fort bien d’avoir une incidence sur vos activités commerciales.

Le 1er juin dernier, la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français (la « Loi 96 »), recevait la sanction royale, signifiant du même coup l’entrée en vigueur de plusieurs dispositions modifiant la Charte de la langue française (aussi connue sous le nom de la Loi 101 et ci-après dénommé la « Charte ») et une vingtaine d’autres règlements et mesures législatives.

Ayant comme pierre angulaire l’affirmation du français comme langue commune et officielle au Québec, l’article suivant explorera et démystifiera les principaux changements que votre entreprise devra apporter pour se conformer à cette nouvelle Loi 96.

La langue de la législation et de la justice

Dès le 1er septembre 2022, tous les actes de procédures émanant d’une personne morale devront être rédigés en français ou joints d’une traduction certifiée dans cette langue, comme par exemple les actes déposés pour régler un litige entre actionnaires ou pour poursuivre un client en défaut de paiement. À cet égard, un acte qui ne respecte pas cette exigence ne pourra plus être déposé au greffe d’un tribunal au Québec.

La langue des communications avec l’administration civile

Les communications entre les entreprises et les organismes gouvernementaux québécois qui sont relatives à l’obtention d’un permis, d’une aide financière ou de toute autre autorisation devront se faire exclusivement en français.

Les contrats conclus avec l’administration au Québec devront également être rédigés en français même si certaines exceptions s’appliquent.

Notons que cette exigence entrera en vigueur dès le 1er septembre 2022.

La langue du travail

Une partie importante de la réforme du gouvernement avec l’entrée en vigueur de la Loi 96 est de fournir un milieu de travail en français aux employés de la province. Elle interdit également toute discrimination et/ou harcèlement d’une personne aux motifs que celle-ci s’est prévalue de son droit de communiquer en français ou encore qu’elle ne parle pas une autre langue que la langue officielle.

Les contrats individuels de travail doivent par ailleurs être rédigés en français lorsqu’ils sont d’adhésion. C’est ainsi que dans un contrat ou les clauses essentielles sont décidées à l’avance par une partie (généralement l’employeur) et dont les termes ne peuvent être réellement négociés, les parties ne seront liées par une version dans une autre langue que le français que

  • lorsqu’ils auront au préalable pris connaissance de la version française du contrat; et
  • qu’ils auront décidé expressément d’être liés par la version dans une autre langue.

À l’inverse, le contrat individuel de travail de gré à gré (nous le retrouvons fréquemment lors de l’embauche d’un cadre, par exemple) pourra être rédigé seulement dans une autre langue, à la volonté expresse des parties.

De surcroit, les employeurs devront prouver certains critères additionnels lorsqu’ils exigeront l’utilisation d’une langue autre que le français au sein de leur entreprise (notamment lors de l’embauche). Sous l’égide de la Charte , les employeurs n’avaient qu’à démontrer que la connaissance d’une autre langue était nécessaire à l’accomplissement de la tâche. Dorénavant, l’employeur doit avoir pris tous les moyens raisonnables pour éviter d’imposer une exigence de la sorte. Pour ce faire, il doit avoir au préalable :

  1. évaluer les besoins linguistiques réels associés aux tâches;
  2. s’être assuré que les autres membres du personnel n’ont pas déjà suffisamment de connaissances linguistiques pour accomplir ces tâches; et
  3. restreindre au maximum le nombre de postes desquels découlent une exigence de parler une autre langue que le français.

La langue du commerce et des affaires

Comme mentionné précédemment, les contrats d’adhésion doivent être rédigés en français. Pour qu’une partie puisse exprimer le souhait d’être liée par une version dans une autre langue que le français, elle doit obligatoirement avoir obtenu la possibilité de lire la version française au préalable. Par conséquent, la clause usuelle insérée dans les contrats prévoyant que les parties acceptaient de concert de conclure les documents transactionnels dans une autre langue que le français ne sera plus suffisante pour les contrats d’adhésion.

Il en va de même des catalogues, brochures, médias sociaux et autres documents qui doivent être rédigés en français comme le prévoit la Charte. Si une entreprise décide de rendre disponible au public un tel document dans une autre langue que le français, ladite entreprise doit obligatoirement rendre accessible une version française dans des conditions au moins aussi favorables.

En vertu de la Charte, les exigences relatives à l’affichage public visible du nom de l’entreprise depuis l’extérieur sont renforcées et le français doit y figurer d’une façon prédominante par rapport à toute autre langue. Un ratio 2:1 entre les deux langues est jugé adéquat dans les circonstances. Il existe également une exception pour certaines marques de commerce permettant d’outrepasser cette exigence de la prédominance du français. Ainsi, si une marque de commerce est dûment déposée et qu’aucune version correspondante en français ne se trouve au registre des marques, l’entreprise pourra bénéficier de l’exemption et afficher sa marque à l’extérieur exclusivement dans une autre langue. Notons que les dispositions du présent paragraphe entreront en vigueur trois ans après la sanction, soit le 1er juin 2025.

Par ailleurs, les inscriptions au Registre des droits personnels et réels mobiliers (le « RDPRM ») devront être rédigées exclusivement en français. Les sûretés telles que les hypothèques mobilières ne pourront donc plus faire l’objet d’une inscription dans une autre langue que le français.

Francisation des entreprises

Sous l’ancienne Charte, seules les entreprises employant 50 personnes et plus étaient assujetties au processus de francisation. Avec les modifications apportées par la Loi 96, ces exigences s’étendront aux entreprises comptant plus de 25 employés (le nombre d’employés est calculé sur une période de six mois). En d’autres mots, l’Office québécois de la langue française (l’ « OQFL ») pourra désormais exiger la création d’un comité de francisation à cette catégorie d’entreprise si elle conclut que l’usage du français n’est pas généralisé à tous les niveaux au sein de celles-ci.

Notons également que les dispositions relatives à ce processus de francisation entreront en vigueur trois ans après la sanction de la Loi 96, soit le 1er juin 2025.

Conséquences et non-conformité

La Loi 96 élargit le spectre des sanctions à l’égard des entreprises en cas de non-conformité avec les dispositions de la loi. Dorénavant, toute personne peut intenter une action civile lorsqu’elle estime que ses droits en matière de langue française ont été violés. Les amendes ont été augmenté au montant de 3 000 $ à 30 000 $ pour une première infraction (l’amende maximale était auparavant de 20 000 $). Elles doubleront et pourront même tripler pour des infractions subséquentes.

Il existe désormais une présomption que les administrateurs ont commis l’infraction perpétrée par une personne morale dans le cadre de la Loi 96. La preuve par les administrateurs qu’ils ont agi avec diligence en prenant toutes les précautions nécessaires pour éviter cette situation contrebalance toutefois la règle.

Une partie qui se sent lésée par les dispositions d’un contrat ne respectant pas les exigences établies par la Loi 96 peut en demander la nullité ou encore demander la réduction de ses obligations concomitantes.

Finalement, l’OQFL pourrait avoir recours à l’injonction pour faire cesser une conduite jugée non conforme à la loi (ou encore, forcer un contrevenant à se conformer aux dispositions de la Loi 96). L’injonction sera également utilisée pour ordonner la destruction ou le remplacement d’affiches, annonces, enseignes lumineuses et panneaux-réclame ne respectant pas les exigences prévues dans la loi.

Le présent article renferme une analyse globale des principales règles touchant directement les entreprises, mais plusieurs autres spécificités y sont prévues. Avec ses professionnels bien au fait de la Loi 96, l’équipe de DS Avocats est disponible pour vous soutenir dans les étapes de mise en œuvre des changements nécessaires afin d’assurer la conformité de votre entreprise aux exigences imposées par la Loi 96. N’hésitez pas à contacter un membre de notre équipe pour toute question concernant cet article ou pour recevoir plus de renseignements au sujet de la Loi 96.

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